Tipa tipa Nenel Cassy est arrêté et on attend les autres

L’ancien député Victor Profane : le moins chanceux de tous
En Haïti, parler de justice revient souvent à parler de vent : tout dépend de sa direction, de sa force et surtout… de qui le souffle. C’est un secret de Polichinelle que la justice haïtienne navigue à vue, au gré des intérêts politiques du moment.
Et dans ce théâtre d’inégalités, certains trinquent pendant que d’autres rient sous cape.L’ancien député de la circonscription de Petite-Rivière de l’Artibonite, Victor Profane, est aujourd’hui sous les verrous. Il est accusé par des membres du groupe armé Gran Grif d’être leur patron, leur mentor. Des déclarations qui, venant de bandits, devraient être accueillies avec prudence.
Mais dans ce pays où le soupçon suffit pour jeter un homme en prison, Victor Profane paie le prix fort.Pendant ce temps, d’autres figures politiques, pourtant citées dans des témoignages similaires, jouissent d’une tranquillité presque arrogante.
L’ancien sénateur Youri Latortue, pourtant désigné par les membres du gang Kokorat San Ras comme leur parrain et leur coach, continue ses activités sans être le moins du monde inquiété.
Jean Renel Sénatus, lui, a été nommément accusé par le tristement célèbre bandit Sonson, aujourd’hui détenu aux États-Unis, d’être le créateur – voire le père fondateur – du groupe armé 400 Mawozo. Pourtant, pas une seule pétale de rose n’a effleuré son dossier judiciaire.
Quant à Nenel Cassy, ancien sénateur également, il s’est tout simplement permis de se moquer publiquement d’une convocation judiciaire pour ses supposés liens avec des bandes armées, comme si la justice n’avait plus aucune autorité morale.
Ainsi va la République : la dérision remplace la rigueur, l’impunité règne en maître, et la balance de la justice semble pencher selon l’appartenance politique du moment. Pourtant, tous ceux qui ont été cités, même indirectement, par des membres de gangs, ont le devoir – sinon moral, du moins citoyen – de se présenter devant la justice, avec ou sans convocation.
L’ancien député Cholzer Chancy qui était déjà en prison pour corruption, libéré par les bandits lors de l’assaut du pénitencier national, s’est remis à la justice. Peu de temps après, il est relâché sous habeas corpus en présentant un air patibulaire.
Il a recouvert sa liberté un jeudi et le week-end suivant, en pleines réjouissances dans le giron de l’orchestre Septentrional.
Mais hélas, en Haïti, on choisit ses coupables comme on choisit ses ennemis : selon la direction du vent.
Par Ed Exil-Noël