Haïti-Justice: Quand le CSPJ tente de restaurer l’intégrité judiciaire

À travers une série d’auditions de magistrats non certifiés entamée cette semaine, le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) amorce une opération de transparence qui, si elle est menée avec rigueur, pourrait marquer un tournant salutaire pour la justice haïtienne.

Cette première phase d’auditions, programmée du 5 au 8 août, concerne vingt magistrats. Ils seront au total une quarantaine à devoir s’expliquer devant les instances disciplinaires du Conseil.

Objectif affiché : revisiter des décisions de non-certification, offrir à chacun l’opportunité d’un plaidoyer équitable, et – peut-être – redresser ce qui pourrait relever d’injustices administratives ou de lacunes procédurales.Ce geste du CSPJ est, en soi, notable.

Dans un pays où la méfiance envers les institutions est profonde, où la justice est souvent perçue comme opaque, voire instrumentalisée, la volonté de réexaminer les dossiers sur la base de principes de droit – transparence, équité, individualisation – mérite d’être soulignée.

Trop souvent, les décisions de certification ont été entourées de zones d’ombre, alimentant le soupçon de règlements de comptes internes, de pressions politiques ou d’arbitraire technocratique.

Mais si cette révision est une bonne nouvelle, elle ne saurait à elle seule redorer l’image d’un pouvoir judiciaire fragilisé par des années de dysfonctionnements, de corruption et de défaillance structurelle.

Le système judiciaire haïtien souffre d’un manque criant de ressources, d’une lenteur chronique, et d’une politisation à peine voilée. À cela s’ajoute une insécurité grandissante, qui rend même la tenue des audiences parfois incertaine.

Dans ce contexte, le travail du CSPJ ne peut être simplement technique. Il doit être aussi moral. Réexaminer les dossiers, oui.

Mais dans une logique de refondation, pas de replâtrage. Il ne s’agit pas seulement de juger les magistrats : il faut aussi interroger les critères mêmes de la certification, les pratiques internes du Conseil, les éventuelles influences extérieures. Il s’agit, au fond, de reconstruire un lien de confiance entre le peuple haïtien et son appareil judiciaire.

Il est trop tôt pour dire si cette initiative portera ses fruits. Mais elle constitue, dans l’instant, un signal modeste mais nécessaire : celui d’un sursaut de conscience institutionnelle. À condition qu’il ne soit pas éphémère.

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